dimanche 14 octobre 2007

L'homme invisible

L’homme invisible

L’homme invisible n’est invisible que pour qui cherche à le voir. Sinon, il n’existe même pas.

Il me faudra arracher une à une toutes les bandelettes qui s’enroulent à mes yeux autour de ce vide humain. Cette silhouette m’empêche de voir le paysage. Cette enveloppe rompt la ligne de l’horizon, la ligne de ma vie.
Lentement, désespérément, dérouler les signes palpables de son improbable existence ; ôter sans fin la gangue trompeuse de l’espoir, pauvre masque mortuaire qui s’obstine à grimacer en moi ; effacer les lignes blanches tissées de ce qui fut, de ce qui aurait pu être ; estomper les pauvres contours du fantôme un peu pâle ; et dévoiler, derrière l’empreinte gravée du mirage, l’unique réalité du vide. De ce qui jamais plus ne sera.
Mon regard enfin pourra suivre la course sans fin de l’horizon. Cette colline, le bosquet d’arbres qui frissonne, la courbe douce qui s’amorce d’une vallée, toutes les infimes variations qui ne dessinent au total qu’une ligne éternellement droite. Le tracé sera continu. Rien n’arrêtera plus en moi le trait infini de votre réalité.
La platitude harmonieuse.

L’homme invisible alors aura cessé d’exister.

Juin 1994

1 commentaire:

Anonyme a dit…

beau texte...
mais je préfère la femme invisible